Je souhaite que les lectures des chroniques précédentes sur le sommeil vous aident à comprendre son fonctionnement et son importance.
Je vous rappelle que je ne suis pas médecin et que le seul but de ces articles est de vous offrir la possibilité de comprendre l’intérêt du sommeil.
Je vous ai présenté de façon simplifiée et généralisée le fonctionnement du sommeil, ses cycles et les différentes structures; tous aussi importantes les unes que les autres.
Dans l’article aujourd’hui, nous allons aborder la caféine et la mélatonine qui font fureur sur internet comme une solution au sommeil, et aussi vous exposer le principe de la sieste et du rêve.
Mélatonine
Au centre du cerveau, nous avons une boule (système limbique) qui est reliée à la colonne vertébrale par le tronc cérébral. Cette boule est le centre de contrôle automatique inconscient qui s’occupe de réguler l’équilibre de votre santé.
Elle gère les hormones, tous les stimuli et comportements que vous ressentez.
Cette boule limbique comporte des glandes que vous connaissez tous comme le thalamus, l’hypothalamus, l’hypophyse et la glande spinale entre autres.
Se trouve aussi le noyau suprachiasmatique qui communique avec le cerveau et le corps sans cesse pour signaler le jour et la nuit.
Le messager du jour et de la nuit se nomme la mélatonine. Cette hormone est diffusée dans le sang peu de temps après le coucher du soleil par la glande pinéale. Ensuite, se déclenche alors une retentissante rengaine qui annonce qu’il fait nuit et qu’il est temps d’aller dormir !!!
La mélatonine régule le moment où le sommeil arrive en signalant l’obscurité à l’organisme. Elle annonce à d’autres parties du cerveau de se mettre en marche, mais elle ne participe pas au sommeil.
Comprenez bien que la mélatonine n’est pas un somnifère. Elle ne fait qu’annoncer aux parties qui dirige le sommeil, que c’est le moment de se mettre au travail.
Imaginez d’être invité à une soirée où lorsque vous arrivez, un maître de cérémonie annonce à haute voix à tous les invités présents votre nom pour vous introduire à la soirée. C’est le rôle de la mélatonine.
Le maître de cérémonie ne participera pas à ce qui va se passer pendant l’évènement, ce n’est pas son rôle. Les invités et les organisateurs auront tous un rôle à tenir pour le bien-être de la soirée.
La concentration de la mélatonine baissera lentement tout au cours de la nuit, puis aux premiers rayons de soleil perçu par le nerf optique, même les yeux fermés, la glande pinéale stoppe la sécrétion de la mélatonine qui annonce aux « invités que la fête est terminée » !
La diffusion de la mélatonine ralentit vers 4 heures du matin, c’est ce qui pourrait expliquer la difficulté pour se rendormir profondément vers 5h du matin. « Les invités commencent à quitter la soirée et l’ambiance n’est plus la même ».
Beaucoup prennent de la mélatonine avant de prendre l’avion ou pour dormir en pensant que cette molécule est un somnifère naturel. Ce n’est pas le cas. Mais elle peut induire à la glande pinéale que c’est la nuit et tenter de déclencher l’application du sommeil.
Il peut donc être intéressant de prendre de la mélatonine pour réguler le déclencheur du sommeil afin de retrouver un comportement régulier, mais… demandez conseil à votre médecin !!!
Sachez que la mélatonine vendue sans ordonnance n’est pas réglementée par des organes reconnus dans le monde comme US Food and Drug Administration.
Les évaluations d’analyses démontrent des concentrations de mélatonine allant de 83% de moins que sur l’étiquetage à 478% de plus…
(L. A. ERLAND et P. K. SAXENA, « Melatonin natural health products and supplements : presence of serotonin and significant variability of melatonin content », Journal of Clinical Sleep Medicine, vol. 13 (2), 2017, p. 275-281. ).
Caféine
Le café est la deuxième denrée la plus vendue dans le monde après l’huile. Il est bu comme un simple breuvage ou comme un stimulant psychoactif.
La caféine se pose sur les récepteurs de l’adénosine (rappelez-vous, l’adénosine est une petite molécule qui indique la baisse d’énergie tout au long de la journée). Le signal d’endormissement qui est normalement communiqué au cerveau est bloqué. La caféine donne l’impression d’être éveillé et alerte.
Le pic de la caféine est à son plein potentiel 30 minutes environ après l’avoir ingéré. Il faut 5 à 7 heures pour évacuer 50% de la caféine que vous avez bu. Tant que les 50 autres pour cent n’auront pas disparu, les capteurs du cerveau ne pourront pas percevoir l’adénosine ni percevoir la fatigue accumulée.
Imaginez boire un café à 19h; à 1 heure du matin, vous n’aurez évacué que 50% de la caféine et il faudra plusieurs heures pour faire disparaître le reste. Votre sommeil sera perturbé et agité.
Vous trouvez aussi de la caféine dans le thé et les boissons énergétiques, le chocolat noir, la crème glacée, des médicaments antidouleurs ou pour perdre du poids.
La caféine empêche le sommeil profond, un état indispensable à une bonne santé.
Boire 4 décaféinés correspond à boire un café normal, pensez à ça lorsque vous prenez votre décaféiné le soir…
Quelques personnes rares possèdent une enzyme du foie à action rapide. Ils peuvent boire un café à 19h et s’endormir rapidement quelques heures après. D’autres n’ont pas cette particularité génétique et un simple café du matin pourrait leur poser des difficultés d’endormissement le soir.
Méfiez-vous du « crash de caféine ».
Lorsque vous consommez beaucoup de café dans la journée et la soirée régulièrement, votre système vit avec des récepteurs d’adénosine désactivés. Au moindre manque de caféine, la fatigue vous submergera comme un tsunami.
La sieste
Est-ce bon de faire la sieste ?
Combien de temps peut-elle durer ?
La vie moderne dans les pays développés crée un sommeil contre nature.
Les adultes dorment de manière monophasée, c’est-à-dire en une fois.
Dans les pays où la modernité n’a pas encore envahi la population, la vie est réglée par le rythme du soleil. La population dort 7 à 8 heures par nuit et fait une sieste de trente à 60 minutes dans l’après-midi soit de manière biphasée.
Le sommeil biphasé n’est pas culturel, mais génétiquement programmé chez tous les humains.
La preuve; nous ressentons tous un moment de fatigue dans l’après-midi avec le désir caché d’aller faire la sieste. La digestion entraîne la somnolence (la digestion demande beaucoup d’énergie à l’organisme et ralentit le système physiologique).
L’être humain est naturellement programmé pour dormir de façon biphasée; la nuit pendant une période de 7 à 8 heures et une sieste l’après-midi. C’est biologique et essentiel à une bonne longévité et à la santé.
Une équipe de chercheurs de l’école de santé publique de l’Université de Harvard a fait une étude sur 23 000 personnes d’hommes et femmes grecs, de vingt à vingt-trois ans sur une durée de 6 ans.
Une grande partie des participants ont mis un terme à la sieste pendant l’expérience.
Les chercheurs ont porté leur recherche sur les conséquences cardiovasculaires. Aucun participant ne présentait d’antécédents de maladie coronarienne ou d’AVC avant l’expérience.
Durant les 6 années de l’expérience, le risque de mourir d’une maladie cardiaque a augmenté de 37% pour ceux qui ont cessé de faire la sieste. Les hommes actifs qui ont cessé la sieste ont vu leur risque de mourir augmenter de 60%.
La longévité se trouve aujourd’hui dans les régions du monde où la sieste fait encore partie de l’hygiène de vie.
Si vous devez faire une sieste, prenez 13 à 20 minutes maximum pour vous reposer et récupérer de l’énergie pour la journée. Si vous faites une nuit blanche et que vous avez à peine quelques heures avant de reprendre votre nouvelle journée, autorisez-vous à dormir des cycles entiers. Dormez 90 minutes (1 cycle), 3 heures (2 cycles), mais ne coupez pas vos cycles afin de ne pas vous réveiller pendant un sommeil profond, vous serez alors plongé dans une torpeur qui sera difficile à dissiper.
Sieste et apprentissage
La sieste est conseillée lors de l’apprentissage. Faire des pauses régulièrement lors des révisions permet d’encoder les connaissances et de laisser l’hippocampe (qui détient la mémoire à court terme) de laisser le sommeil et les ondes lentes faire leur travail en stockant le savoir sur du long terme dans le cortex.
Un bon sommeil biphasé renforce les connaissances et facilite de plus de 20% l’apprentissage.
Le sommeil vous aide à améliorer la mémoire et les nouveaux acquis, et une sieste de 20 minutes peut suffire si elle contient assez de sommeil profond !
Il s’agit de respecter une fois de plus, les deux cycles, circadien et homéostasie, qui sont indépendants l’un de l’autre.
Le rêve
Le rêve peut laisser des souvenirs au réveil. Il se passe dans la phase du sommeil REM, comme vous avez pu le lire dans le précédent article.
Pendant que vous rêvez, 1% de votre vécu au cours des derniers jours peut avoir un lien avec vos rêves. Ce sont vos émotions qui sont traitées.
Le sommeil REM crée une atonie musculaire (catalepsie) afin que les émotions puissent se réguler et construire une nouvelle perception.
Cette atonie musculaire permet au cerveau de vivre les évènements sans placer le corps dans le mouvement.
Lors de la phase de sommeil REM, l’arrière du cerveau (occiput - visuelle) est stimulé, et le cortex moteur (mouvement), l’hippocampe (mémoire autobiographique), les centres émotionnels profonds (système limbique) en traversant l’amygdale par le cortex cingulaire responsable des émotions s’activent.
Ces zones émotionnelles sont 30% plus actives dans la phase REM que pendant l’éveil.
Sommeil REM et transe hypnotique
La technique de l’hypnose se situe dans la phase profonde de la phase REM. Cela permet de confirmer l’importance de l’hypnologie (la science du sommeil) et le sommeil paradoxal (phase REM).
Lorsque vous vous endormez et vous commencez à voir des choses qui n’existent pas (hallucinations), vous vivez une réalité (imagination, sensorialisation). Vous perdez la notion du temps (distorsion temporelle), les émotions se chevauchent jusqu’à s’estomper (dissociation) puis vous oubliez en vous réveillant de la nuit que vous venez de traverser (amnésie).
Ces étapes sont identiques à la transe créée en hypnose.
L’hypnologie…
L’hypnologie se sert des notions fondamentales biologiques et psychologiques normales et essentielles et du sommeil de l’être humain.
En transe hypnotique, l’état cérébral ressemble énormément à l’électroencéphalogramme lors du sommeil REM.
Le cerveau est alors en lien avec toutes ses connaissances et a la capacité d’ouvrir la perception de ses croyances et de ce que la conscience considère comme acquis.
L’hypnologue est là pour suggérer d’autres possibilités, d’autres solutions en utilisant un langage verbal et non verbal. L’imagination vit alors une nouvelle réalité sans complexe ni retenue. Le rêve rééquilibre la perception émotionnelle.
Les zones visu spatiales (occiput), le cortex moteur (lobe pariétal), l’hippocampe et les régions avoisinantes et le système limbique, sont 30% plus actifs que lors du réveil.
Il devient possible de mettre en relation une partie de la conscience et de l’inconscient et de leur permettre de travailler ensemble !
Le rêve pourrait être une thérapie émotionnelle…
Dissociation et déclencheur émotionnel
Antonio Damasio (professeur en neurosciences et psychologie), démontre dans son livre « Spinoza avait raison » que les déclencheurs émotionnels et comportementaux se situent dans le corps.
Chaque évènement a eu un impact et a créé un déclencheur dans votre corps, qui s’active à chaque fois qu’un évènement se répète, et que l’inconscient le perçoit.
Le déclencheur fait appel à l’émotion qui a ancré l’évènement afin de mettre en place un comportement à l’état cérébral encodé.
Au moment du sommeil paradoxal ou de la transe hypnotique, le corps est en atonie musculaire totale et les déclencheurs ne peuvent pas agir.
Le cerveau vit les évènements, mais les émotions limitantes ne sont pas déclenchées.
C’est comme si tout ce qu’il perçoit de connu ne lui appartient pas, il est spectateur, en toute sécurité. Il n’y alors plus de limites et l’imagination s’autorise à extrapoler le meilleur scénario pour atteindre la solution recherchée.
L’hypnologue crée un nouvel ancrage à la sortie de transe pour qu’il devienne un déclencheur pour le nouveau scénario.
L’hypnose permet de créer des rêves lucides, de diriger l’inconscient à dissocier les émotions limitantes afin de changer le scénario par de nouvelles possibilités.
Le Docteur Matthew Walker, dans son livre « Pourquoi nous dormons » (p227) dit :
« … la phase de rêves du sommeil REM accomplit deux objectifs majeurs :
Dormir pour se souvenir des détails d’expériences précieuses et essentielles pour les intégrer à ses connaissances déjà en place dans une perspective autobiographique.
Dormir pour oublier la charge émotionnelle viscérale et douloureuse auparavant rattachée à certains souvenirs.
La phase de rêves permettrait dans ce cas une sorte d’introspection à des fins thérapeutiques. »
Et :
« Le sommeil, plus précisément le REM, est nécessaire à la guérison de nos blessures émotionnelles. »
Le docteur Matthew Walker insiste aussi sur l’importance du rêve dans sa fonction de laboratoire de recherche et de créativité.
Qui n’a pas entendu de ses parents :
- Lis ton cours avant de t’endormir, tu t’en souviendras demain matin.
Matthew Walker écrit dans son livre (p237) :
« Lorsque vous rêvez, votre cerveau brasse de larges pans des savoirs acquis pour en extraire des règles générales et des points communs – disons l’essentiel.
À notre réveil, le réseau de notre esprit est comme révisé, capable de trouver des solutions et des problèmes auparavant inaccessibles. Le rêve pendant le sommeil REM s’apparente ainsi à une sorte d’alchimie des informations. »
Hormone du stress et le rêve
Les personnes stressées et anxieuses doivent commencer par définir leur problématique pour retrouver un bon sommeil.
Leur système nerveux déclenche trop de cortisol qui laisse des traces.
Lors du sommeil REM se trouve le seul moment où le cerveau doit être totalement dépourvu de noradrénaline. Un corps submergé par ce cocktail chimique n’a pas la possibilité de libérer le cerveau de cette hormone pendant les phases du sommeil. Cela entraîne une incapacité au rêve de faire son travail.
Retenez
- L’être humain consomme son énergie vitale en 16 heures environ. Après ce laps de temps d’éveil, le cerveau joue des tours et devient dysfonctionnel. L’être humain a besoin de dormir plus de 7 heures par nuit pour préserver ses performances cognitives.
- Après 10 jours de 7 heures et moins par nuit, le cerveau est aussi dysfonctionnel qu’après une nuit blanche.
- Trois bonnes nuits de sommeil ne suffisent pas à restaurer un état normal après une semaine de sommeil insuffisant.
- Toutes les phases, REM et NREM dans le sommeil ont leur importance.
- Se priver de sommeil entraîne une dégénérescence physique, biologique et psychologique.
- Ne pas assez dormir ne fait pas gagner du temps bien au contraire. Cela entraîne et accélère les maladies et ne flatte que l’ego !
- La caféine n’est pas un annihilateur de fatigue mais un psychoactif avec qui vous faite un pacte qui est lourd de conséquence sur du long terme.
- La mélatonine n’est pas un somnifère mais un maître de cérémonie qui annonce le moment où le sommeil doit se faire.
- Vous désirez amplifier vos potentiels physiques et intellectuels ? Installez une routine de plus de 7 heures par nuit toutes les nuits.
- Si vous avez des problèmes de sommeil, consulter un médecin pour définir la cause et au mieux, un médecin du sommeil. Ensuite, vous pourrez vous diriger vers un spécialiste qui vous accompagnera, dans la problématique qui crée votre manque de sommeil.
- N’oubliez jamais que votre conscience n’a pas les capacités de réaliser à quel point il peut manquer de sommeil !!!
Retrouvez-moi dans la prochaine chronique pour comprendre comment améliorer votre sommeil, quel pourrait en être les causes et comment avec de simples techniques cognitivo-comportementales, vous pourriez utiliser le meilleur médicament et somnifère gratuit au monde - LE SOMMEIL !!!
En attendant, prenez soin de vous et faites confiance… à la partie qui sait !
Emmanuel
PS : Prenez un instant pour laisser une trace de votre passage svp.
Un clic sur le cœur si vous avez aimé, un petit commentaire est un plus et le partage... est le must !!!
Merci par avance
5- Lâcher prise dans le vie quotidienne (à venir)
c'est tellement intéressant Emmanuel : le contenu bien entendu mais pas uniquement. Avec ta façon d'écrire en mode storytelling (je trouve), ton aisance de vulgarisateur pour un sujet si complexe, tes apartés très illustrants, éclairants et reposants pour le cerveau (parce que le sujet est pas mal intense), tu nous éclaires. J'aime aussi ton approche passerelle : faire un lien entre le quotidien, les expériences du quotidien et ce qui se passe dans notre cerveau. Le sujet me passionne depuis près de 10 ans et je veux apprendre plus dessus mais j'ai la sensation désagréable de ne pas réussir à mémoriser. Ce que tu écris m'aide vraiment. Un auteur me vient toujours à l'esprit quand je lis sur le cerveau…