Le 12 octobre 2019, il y a un peu plus de deux ans, j’ai vécu une expérience exceptionnelle que je ne vous ai jamais partagée sur ce blog…
Genèse
Tout a commencé en janvier 2019, lorsqu’une de mes anciennes élèves, devenue une amie avec le temps, m’a suggéré de participer à un TED.
Je n’avais aucune idée de ce qu’elle percevait en moi, et qui méritait d’être partagé à un grand public.
Je connaissais TED et son organisation internationale qui mettaient en valeur des experts dans leur domaine en vidéos sur YouTube.
Les passages sur scène durent environ 15 minutes suivant un protocole très particulier déposé par la structure du TED. L’objectif des interventions est de faire réfléchir le public en apportant de la matière à réflexion.
Beaucoup parle d’eux-mêmes, leur existence, leur maladie ou les handicapes qu’ils ont surmontés. D’autres créent des sketchs afin de faciliter la compréhension de leur expertise à un public et les emportent dans un univers qu’il n’aurait jamais abordé dans un autre contexte.
Me considérant comme un homme lambda, n’ayant pas particulièrement envie de parler de mes malheurs, ni croyant posséder une expertise hors du commun, je n’aurais jamais osé avoir la prétention de m’inscrire à un tel évènement.
La proposition de mon amie Laura n’était pour moi qu’une idée supplémentaire posée sur un tableau lors d’une réunion de brainstorming.
La simple pensée que cela pourrait se faire disparut en quelques heures.
6 mois avant le spectacle
Quelques semaines plus tard, Gildo Conte, fondateur – producteur et chef de la curation de TEDx Laval m’a appelé. J’appris que Laura m’avait inscrit, déposé un dossier, et que j’étais retenu. J’ai rapidement compris que l’aventure serait grande et ambitieuse !!!
Je n’ai pas choisi le thème moi-même. C’est de nouveau Laura qui m’a soufflé l’idée.
Je partais d’une page blanche qui devait parler de la partie qui sait.
Je devais trouver d’autres mots pour que tous ceux qui ne me connaissent pas se sentent concernés par le thème que j’allais aborder.
Il m’a paru évident que pour avoir accès à « PEQS » (la PartiE Qui Sait) il fallait se retrouver seul avec soi-même.
Maintenant, le mot solitude est souvent angoissant et à l’encontre de ce que recherche l’être humain. De plus, nous avons tendance à appeler « problème » tout ce que l’on veut éviter. Un problème est un ennemi… Pour changer la perception ; solitude = éviter de/ennemie - appeler mon passage « Mon ami, la Solitude » ne pouvait qu’interpeller le public.
Les 6 mois d’écriture et de répétition n’ont pas été trop longs pour entrer dans le format du TED.
Faire et défaire, réécrire, puis effacer, organiser un fil conducteur, puis le changer et tout recommencer a été une lutte pour tenter d’être à la hauteur de monter sur scène, sur le tapis rouge du TED.
Il fallait un début et une fin, et commencer par la fin pour que le public puisse comprendre dès le début l’orientation de la prestation.
Une métaphore se construit, se transforme et se réinvente. Pourtant l’idée reste la même et doit avoir un impact. La métaphore peut être magnifique, comme une bonne blague, mais peut tomber à plat si ce n’est pas le moment de la placer.
Mon objectif était de créer une suite d’histoires avec des métaphores et des analogies où le public pourrait se retrouver dans leur vécu avec d’autres mots.
Mon passage devait être une projection de l’histoire de chacun, de questionnement que nous avons tous eu et que nous pouvons avoir encore chaque jour. Je propose que toutes les solutions soient à la disposition de tous, si, et seulement si, nous nous autorisions à écouter ce qui se passe au plus profond de nous.
Je répétais mes métaphores à haute voix dans la voiture à chaque déplacement. Je me suis filmé une vingtaine de fois dans mon bureau pour prendre conscience de ce que j’allais projeter. Même si je me trompais, je poursuivais, car je ne voulais pas prendre l’habitude de recommencer si je me trompais sur scène.
Quelques vidéos ont été vues et analysées par Maryse qui devait m’accompagner dans la préparation de ma prestation.
J’avançais à l’aveugle, je répétais sans public sans savoir comment le public allait réagir. Le jeu de scène et de déplacement ne peut exister dans un TEDx car l’orateur doit rester sur le tapis rouge et ne pas en sortir pour rester cadré dans la vidéo.
1 mois avant le spectacle
Un mois avant la soirée, une répétition a eu lieu.
Nous sommes passés à tour de rôle sur la scène d’un théâtre d’un CGEP à Laval.
Le stress était à son comble.
Pour la plupart, nous ne nous étions vu qu’une fois lors d’une réunion pour nous introduire dans le monde du TED.
Certains avaient leur texte à la main, d’autres le lisaient et d’autres s’arrêtaient, puis reprenaient par chapitre.
Après chaque intervention, nous applaudissions la prestation et les coachs et la direction du TEDxLaval débriefaient ouvertement, chacun à leur tour, en nommant ce qu’ils avaient aimé et ce qu’il était bon d’améliorer.
Je pouvais voir chaque intervenant devenir blême après leur prestation en écoutant les feedbacks. La salle sentait le doute, empestait la crainte, embaumait la peur.
Plus le temps passait, plus je stressais. Je n’avais pas peur de ne pas être capable de dérouler mon texte, j’avais peur que le contenu de mon intervention ne soit pas à la hauteur des autres participants.
Je suis passé le dernier à la répétition...
Lorsque je suis monté sur la scène de ce CGEP en regardant mes pieds, j’ai pris une profonde inspiration en relevant la tête et en pensant; fais ce que tu as à faire… et j’ai joué mon texte.
Lorsque j’ai terminé, j’ai regardé les participants qui m’avaient écouté, assis bien sagement. Je les regardais, figé, sans réaction. Le temps s’écoulait… J’avais en face de moi des statues de sel.
Et puis, un coach a émergé et il y eut une explosion d’applaudissement !!!
C’était à mon tour d’être figé, je percevais leur surprise et je ne savais pas, si c’était ce qu’il fallait faire pour un TEDx, être original.
Et puis, les coachs ont donné leur avis : « je ne sais pas quoi te dire, tu es prêt », « Ben écoute… parfait », « tu pourrais monter sur scène maintenant » et puis une autre a placé le doute, «c’est bien, mais je pense que tu devrais tout reprendre et parler plus de toi ».
Mon monde c'est écroulé...
Alors j’ai pris du recul, je n’avais pas le temps ni l’envie de reprendre à zéro tout le travail que j’avais fait pendant 5 mois. J’ai décidé d’assumer ma prise de risque en sortant du modèle du TEDx afin d’être qui je suis tout au long de l’année.
J’ai retravaillé les liens entre les métaphores, j’en ai supprimé pour être dans les temps et j’ai répété encore et encore.
En fin de journée, nous nous sommes retrouvés au Hilton à Laval pour présenter à la Press la soirée qui nous attendait en Facebook live.
C'était le 12 septembre 2019 et j'ai eu l'honneur de me retrouver en binôme avec Martin Ducharme qui a parlé de son livre "Le sixième talent" (coauteur Carole Doucet), qu'il m'a gentiment offert. En faire la promotion a été un running gag pour moi...
Vu l'énergie qui régnait sur le plateau, on peut deviner qu'il était temps pour moi, après cette journée, de relâcher la pression !
Jour J
Nous sommes arrivés le samedi 12 octobre 2019 en début d’après-midi au théâtre de Laval.
Le staff était là pour nous recevoir et nous accompagner jusqu’au spectacle. Nous étions heureux de nous retrouver; participants, staff et direction. Un évènement comme celui-là crée un lien fort et puissant. Nous étions tous excités avec une hâte de monter sur scène et en même temps une peur bleue.
Une chose est certaine, je tiens à remercier tous ceux qui m’ont accompagné et tenu compagnie tout le long de cette aventure, les coachs et en particulier Maryse Belley, tous les conférenciers(ières) qui sont montés sur scène, (Martin Ducharme – Jean-François Lavallée – Zaïnab Sawan – Corrie SIrotta – Marisa Murray – Paul Simard – Rhett Gervais), la direction et tout le staff que je ne saurais nommer sans en oublier et surtout Laura Eynard, sans qui, cette aventure n’aurai pas existé pour moi. De plus, c'est la rencontre avec un nouvel ami et ancien participant à un Tedx salon, Bruno Begin.
Nous avons eu tout le temps de faire le tour du théâtre, de visiter les coulisses, d’écouter le protocole de la soirée afin d'en connaître le déroulement.
Nous étions 8 à monter sur scène; 4 anglophones et 4 francophones. Nos prestations étaient intercalées dans chaque langue. Il y aurait un entracte et je devais passer le dernier de la première partie.
J’étais debout dans les coulisses, mon micro était en place et je respirais profondément.
Je ne sais même plus qui était avant moi. C’était de l’anglais, c’est certain, mais je ne comprends pas l’anglais…
J'étais dans un autre monde et je rejetais sans cesse la petite voix qui me disait :
" Tu vas oublier ton texte et le lien conducteur de ta prestation !!! "
Je buvais de l’eau à la bouteille par petites gorgées, alors que je n’avais pas soif. L’équipe nous avait mis en garde sur la gorge sèche due au stress, alors je buvais encore et encore.
Malgré tout ce liquide, j’ai quand même eu la gorge sèche et la bouche pâteuse avec des bruits de bouche et de langue dû la déshydratation.
Puis ;
« Manu, c’est à toi ! Fais ce que tu sais faire… »
Les minutes qui ont suivi sont placé dans la case amnésie...
Je n’ai pas su profiter de ce moment; des réactions du public avant la pause, où j’ai pu les rencontrer. C’est comme si, dès la pose du micro sur ma tête par Laura, je suis entré en transe profonde jusqu’à son retrait.
Les témoignages qui m’ont été faits après le spectacle m’ont touché profondément et surpris. Je n’aurais pu imaginer qu’un public puisse être embarqué en quelques minutes et apprécier mes quelques mots.
Aujourd’hui
Aujourd’hui, en cette fin d’année 2021, je suis heureux d’avoir participé à cet évènement et de l’accueil sur YouTube au lancement de la vidéo par le TED, fin novembre 2019.
Plus de 107 000 vues en deux ans me permettent de comprendre que la partie qui sait, la solitude, l’autohypnose sont à la portée de tous.
Si je pouvais refaire un TED ou une scène, je profiterais différemment du moment, je m’autoriserais à jouer plus avec le public, me nourrirait de leur énergie pour en faire un moment ultime gravé dans la pierre où je pourrais continuer à saupoudrer…
Faites confiance à la partie qui sait !
Bon visionnement !!!
Emmanuel
PS : Prenez un instant pour laisser une trace de votre passage svp.
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Merci par avance
Des souvenirs forts d'un moment fort en émotion - tu peux être fier de cette expérience que tu as su relever en beauté😊
Moi non plus, je n'ai jamais vu d'éléphants dans les rues! 😁 Absolument épatant Emmanuel, merci!